La République d’Haïti ne cesse de s’enfoncer dans la crise, une crise multidimensionnelle qui parait de jour en jour inextricable et irrémédiable. Le deuxième lundi du mois en cours n’a pas arrangé les choses. Au contraire, il les envenime, penseraient plus d’un.
En fait, depuis ce jour le pays n’a plus de dirigeant élu tant sur le plan local que national. Car le mandat des dix derniers sénateurs qui étaient théoriquement et légalement en fonction arrivait à échéance le 9 janvier dernier.
Pour que cette situation ne fût pas présentée, des élections devraient être organisées depuis plus de six ans. Malheureusement elles ne se sont jamais tenues. Et aujourd’hui avec le contexte dans lequel vit la Nation haïtienne où ce sont les gangs lourdement armés qui contrôlent presque tout le territoire, organiser des scrutins rapidement est matériellement impossible. Mais rappelons que le Premier Ministre Ariel Henry a décrété 2023 l’année électorale.
En tout cas, mentionnons que la fin du mandat du dernier tiers du Sénat a été juste symbolique car dans les faits, le pouvoir législatif d’Haïti était totalement dysfonctionnel depuis trois ans quand l’ensemble des députés et deux tiers des sénateurs ont quitté leur poste sans successeur élu pour les remplacer. Après les élections de 2016 qui l’ont porté au pouvoir, le président Jovenel Moïse n’avait pas organisé un seul scrutin et son assassinat, en juillet 2021, a plongé davantage le pays dans la crise. Sans président, ni député ni sénateur, c’est le chef du gouvernement le très contesté, très décrié Ariel Henry sans aucune légitimité qui gère les affaires.
À titre de rappel, disons que M. Henry avait été nommé Premier Ministre 48 heures seulement avant l’attentat qui a coûté la vie au chef d’État Jovenel Moïse. Aucun texte de loi ne prévoit la vacance à la fois du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif et la classe politique est à couteaux tirés, incapable de s’entendre sur un compromis. Un point sur lequel tous s’entendent : rétablir la sécurité avant de pouvoir organiser un vote.
Les gangs qui contrôlent aujourd’hui plus de 60% du territoire seront à prendre en compte dans l’équation « élections », car ils disposent d’une large manne financière, amassée notamment via les rançons des enlèvements qu’ils commettent quotidiennement.